vendredi 2 septembre 2011

Arrivederci Sicilia

Il me fait plaisir de mettre à votre disposition quelques articles que je signais en tant que collaboratrice spéciale du quotidien Le Soleil. Le texte qui suit a fait l'objet d'un article qui a été publié dans le cahier Voyages du quotidien, le 4 février 2006.

Gagné, Marie-Josée
Collaboration spéciale

Quinze jours pour visiter la Sicile, c'est bien peu. Toutefois, ce premier voyage a permis d'identifier d'excellentes raisons d'y retourner, dont les Siciliens eux-mêmes.

Quand il s'agit de la Sicile, il existe de nombreuses possibilités d'itinéraires. Prenant en considération les Fêtes de fin d'année, période de notre passage, nos choix se sont arrêtés sur Palerme pour une durée de trois jours, une journée à Trapani, cinq à Taormina et six dans la région de Modica et de Ragusa.

Avec ses 700 000 résidants, Palerme sait charmer. La capitale dégage encore aujourd'hui les parfums de son histoire. Par son architecture, bien sûr, et également par ses marchés où commerçants vous proposent quantités de poissons, légumes, fruits frais et innombrables épices dans une ambiance chaotique à souhaits.

Que dire de ces quattro canti, places carrées au centre du quartier historique qui, à l'angle de deux rues principales, donnaient naissance aux quatre quartiers de la ville. En toute sécurité, nous avons arpenté Palerme à pied, tout juste avant Noël, alors que les crèches sont partout, que les pâtissiers redoublent d'inventivité et que les Siciliens s'apprêtent à partager de bons moments autour de la table.

Ayant vu Naples, la survoltée, j'appréhendais Palerme. À tort, je l'avoue. Les Palermitains adorent leur ville autant que leur île, sont des plus accueillants et savent rendre le séjour du voyageur des plus agréables. En plus, le coût de la vie nous est apparu tout à fait abordable.

Après nous être passé de voiture volontairement pour visiter Palerme, nous avons pris la route vers Erice pour une visite de quelques heures. Le soleil était radieux, mais le temps, frisquet dans cette petite ville érigée sur un haut plateau triangulaire en terrasse sur la mer. En portant une attention toute particulière, je remarque que certaines maisons semblent abandonnées. Quand je me risque à demander, on me confirme que c'est le cas. Erice a connu des jours meilleurs en tant que site de villégiature. Certains propriétaires qui venaient autrefois passer tout l'été ne viennent qu'une semaine et encore. Toutefois, autant elle paraît secrète aujourd'hui, autant je peux l'imaginer un jour d'été chaud livrer toute sa splendeur.

Filons donc vers Trapani et allons découvrir cette autre ville de bord de mer. Un premier coup d'oeil nous laisse entrevoir les salines qui donnent tout juste en face des îles Égades et où les hommes sont à l'oeuvre entre les mois d'avril et août de chaque année, à récolter l'or blanc. Trapani, qui a vu réduire sa population de 80 000 à 60 000 habitants au cours des dernières décennies, connaît actuellement un regain de vie, grâce entre autres aux régates de l'America's Cup qui en ont fait une de leurs étapes en 2005, 2005, à l'occasion de la 32e présentation. Un restaurateur de Trapani nous a d'ailleurs confié que le centre-ville connaissait actuellement un boum immobilier. À voir les nombreuses restaurations en cours, il n'y a aucune raison de douter de sa parole.

Vingt-quatre décembre, direction Taormina. L'histoire ou la légende veut que Taormina ait été choisie par les Grecs au VIIIe siècle avant J.-C. grâce à son emplacement et à son climat particulièrement doux. Tout est là, c'est vrai : la mer, le village surplombant en balcon, l'Etna, point culminant de la Sicile, avec ses 3350 mètres de hauteur, sa tête en éruption constante et, en cette saison, son collier de neige. Lorsque la chance nous est donnée d'assister à un concert dans ce site privilégié, on comprend pourquoi les Grecs y ont construit ce si beau théâtre. Il est tout aussi facile de comprendre le magnétisme que cet endroit continue à exercer auprès des touristes quand le mercure monte. À notre tour, nous avons été fascinés par la douceur du climat de l'endroit qui nous a offert un ciel radieux et un thermomètre de 17 degrés aux heures du jour les plus favorables et qui nous a permis, le matin de Noël, de profiter de la terrasse de notre hôtel pour y prendre le petit-déjeuner. Pour notre plus grand bonheur, nous étions toujours là le 27 décembre, alors que la flamme olympique est passée, en route vers Turin.

Deux jours plus tard, nous avons mis le cap vers Modica, un bijou de l'époque baroque situé dans une région un peu moins fréquentée de l'île.

Le plaisir de visiter la Sicile est de changer de paysage naturel et urbain en quelques heures à peine. C'est le cas encore ici avec Modica. Ville totalement détruite par le tremblement de terre de 1693, Modica, la culturelle, s'affiche de façon assumée, alourdie par un baroque des plus opulents. Au premier jour de l'an, nous avons eu le plaisir d'assister à un concert offert par la commune dans le très joli théâtre Garibaldi, rénové il y a à peine deux ans. La veille, pas très loin de Modica, dans le village de Scicli, nous attendait l'exposition Vertirsi in Sicilia, où de véritables robes de mariée et des photographies de Giuseppe Leone permettent, ne serait-ce qu'un instant, de se replonger dans cette Sicile d'il y a un siècle. Les mariées de milieu modeste convolaient alors vêtues de noir. On apprend qu'il était aussi possible de connaître l'intérêt des jeunes filles à la façon dont elles revêtaient le châle. C'est d'ailleurs de cette époque et de sa Sicile natale que Domenico Dolce du fameux duo Dolce & Gabbana tira les plus belles inspirations pour ses collections.

En somme, la Sicile est tombée dans ma palette, couleurs, saveurs et odeurs comprises. Cannolis, cassata, pâtes d'amande façonnées selon la plus folle imagination, pistaches de grande qualité, poissons, fruits de mer, huile d'olive, vin de Pantelleria, agrumes à volonté, tomates à faire rougir d'envie et panoramas d'une beauté à n'en plus finir, vraiment, cette île et les plus petites qui l'entourent ont été bénies des dieux, soient-ils grecs, romains, normands ou arabes.

À savoir

Palerme : un B&B et sa propriétaire : www.aicartari.it et Mme Rosi Loria

Taormina : hôtel Villa Ducale : www.villaducale.com et le restaurant al Duomo, www.ristorantealduomo.it

Modica : hôtel relais Modica et ses propriétaires, Antonio et Francesca Modica, www.hotelrelaismodica.it et le restaurant Torre d'Oriente, www.torredoriente.com

Ragusa : les étonnantes harmonies d'un jeune restaurateur d'Europe, le chef Cuccio Sultano et son associé Angelo Di Stefano au Ristorante Il Duomo, www.ristoranteduomo.it

Scicli : Le Sommelier, une oenothèque où père et fils Giannone proposent les meilleurs elixirs du territoire en plus d'offrir un service impeccable. Nous avons d'ailleurs eu droit à une dégustation de fromage Ragusano DOP (denominazione origine protetta) accompagné d'un vin passito de Pantelleria.

Cet article a été publié dans le cahier Voyages du quotidien Le Soleil, le 4 février 2006. Pour toute utilisation autre que personnelle, vous êtes invité à mentionner la source.

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